Rechercher
Fermer ce champ de recherche.

Quand la préservation d’une espèce protégée fait obstacle à la remise en état du domaine public

11 février 2025

Par une décision du 19 décembre 2024, le Conseil d’Etat juge opérant le moyen tiré de l’atteinte à une espèce protégée devant le juge de l’exécution pour contester une astreinte provisoire dont était assortie une injonction de remettre en état le domaine public.

Condamnée par le tribunal administratif de Bastia à remettre en l’état, sous astreinte de 500 euros par jour de retard, le domaine public maritime sur lequel elle avait implanté une structure en pierre maçonnée sans titre, la requérante se pourvoit en cassation devant le Conseil d’Etat contre l’arrêt de la Cour administrative d’appel du 8 décembre 2023 la condamnant à verser à l’Etat la somme de 124 960 € au titre de l’astreinte due pour la période du 28 août 2017 au 6 décembre 2021.

Alors saisi, le Conseil d’Etat considère que s’il appartient au juge administratif de procéder à la liquidation de l’astreinte dont il a assorti l’injonction de remettre en état le domaine public en cas d’inexécution totale ou partielle ou d’exécution tardive de cette injonction, il lui est possible de modérer, voire de supprimer, cette astreinte « compte tenu notamment des difficultés rencontrées dans l’exécution de la chose jugée par les parties tenues de procéder à cette exécution, des diligences déjà accomplies par elles et de celles qui sont encore susceptibles de l’être ».

En l’occurrence, la requérante se prévalait d’un rapport réalisé postérieurement au jugement ordonnant la démolition des installations et révélant la présence, dans l’emprise de la zone de travaux destinée à détruire la construction, de dattes de mer, lesquelles constituent une espèce protégée sur le fondement de la directive européenne dite « Habitats » et dont la destruction, la capture, l’enlèvement ou encore la perturbation intentionnelle sont prohibés par arrêté interministériel fixant la liste des animaux de la faune marine protégés pris en application des articles L. 411-1 et L. 411-2 du code de l’environnement.

Or, est opérant le moyen tiré de ce que l’exécution du jugement – autrement dit, la remise en état du domaine public – serait susceptible de menacer l’espèce protégée qu’est la datte de mer. Le Conseil d’Etat précise ainsi l’office du juge de l’exécution, qui doit apprécier la réalité de la difficulté d’exécution invoquée par le requérant et, le cas échéant, préciser les conditions d’exécution de la démolition ordonnée et les diligences pouvant être accomplies à cette fin par les parties en évaluant la possibilité éventuelle pour l’autorité administrative d’accorder une dérogation à l’interdiction de destruction d’espèces protégées sur le fondement de l’article L. 411-2 du code de l’environnement.

CE 19 décembre 2024, req. n° 491592.

Newsletter