Par un arrêt du 6 mars 2024, la chambre commerciale de la Cour de cassation juge que, sauf constat de l’existence d’une instance en cours, le juge-commissaire a une compétence exclusive pour décider de l’admission ou du rejet des créances déclarées et, après une décision d’incompétence du juge-commissaire pour trancher une contestation, les pouvoirs du juge compétent régulièrement saisi se limitent à l’examen de cette contestation.
Une société civile immobilière (SCI), placée en redressement judiciaire, a soulevé la prescription de la créance déclarée par sa banque. Après avoir retenu que cette contestation sérieuse ne relevait pas de son pouvoir juridictionnel, le juge-commissaire a sursis à statuer sur l’admission de la créance et rappelé que sa décision ouvrait aux parties un délai d’un mois pour saisir la juridiction compétente à peine de forclusion.
Par un arrêt confirmatif, la cour d’appel rejette la fin de non-recevoir tirée de la prescription puis fixe la créance de la banque dans la mesure où aucune autre contestation n’était soulevée.
Par un arrêt du 6 mars 2024, la Cour de cassation, statuant sur le pourvoi de la SCI, censure l’arrêt d’appel en ce qu’il a fixé la créance au passif du redressement judiciaire de celle-ci.
La Haute juridiction rappelle, au visa des articles L. 624-2 et R. 624-5 du code de commerce, dans leur rédaction antérieure à la réforme de 2014, la compétence exclusive du juge-commissaire pour décider de l’admission ou du rejet des créances déclarées, sauf constat d’une instance en cours. Elle retient en effet que « sauf constat de l’existence d’une instance en cours, le juge-commissaire a une compétence exclusive pour décider de l’admission ou du rejet des créances déclarées et, après une décision d’incompétence du juge-commissaire pour trancher une contestation, les pouvoirs du juge compétent régulièrement saisi se limitent à l’examen de cette contestation ».
Elle en déduit logiquement qu’en « statuant ainsi sur le sort de la créance, alors que ses pouvoirs se limitaient à trancher la contestation relative à la prescription de la créance, sur laquelle le juge-commissaire s’était déclaré incompétent, la cour d’appel a violé les textes susvisés ».
Cette solution n’est pas nouvelle et l’arrêt ici rapporté est le dernier d’une série de décisions, toutes publiées au Bulletin (Com., 8 mars 2023, pourvoi no 21-22.354 ; Com., 9 juin 2022, pourvoi no 20-22.650 ; Com., 19 décembre 2018, pourvois nos 17-15.883 et 17-26.501) tant le mécanisme en présence d’une contestation sérieuse s’avère complexe à mettre en œuvre.
Elle a, de surcroît, vocation à être maintenue. Il convient donc de retenir que le juge saisi de l’examen d’une contestation sérieuse ne peut statuer que sur cette dernière, et non sur l’admission ou le rejet de la créance.