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La jurisprudence Thalamy ne s’applique pas au permis de construire modificatif

13 mai 2024

Le Conseil d’Etat vient poser le principe selon lequel l’autorité compétente ne peut exiger du pétitionnaire que sa demande de permis modificatif porte également sur des travaux irréguliers, sauf à ce que ces derniers aient été constatés par un procès-verbal de constat ; il conviendra à défaut à l’autorité compétente de contrôler les travaux à leur achèvement et d’imposer leur mise en conformité.

Dans cette affaire, la maire d’une commune a délivré un permis de construire en vue de la surélévation et de l’extension d’une maison. A la suite du constat de l’existence d’infractions et de la prise d’un arrêté interruptif de travaux, le pétitionnaire a sollicité un permis de construire modificatif pour remédier auxdites infractions. La Cour administrative d’appel de Lyon a annulé le permis de construire modificatif, sur le fondement de la jurisprudence Thalamy (CE, 9 juillet 1986, req. n° 51172), au motif que le dossier de demande de permis modificatif ne portait pas sur l’ensemble des éléments non conformes au permis de construire initial.

Toutefois, le Conseil d’Etat ne suit pas le raisonnement de la Cour et juge que le permis de construire modificatif n’avait pas à procéder à la régularisation des travaux non prévus au permis de construire en cours de validité, autres que ceux constatés par procès-verbal lors d’opérations de contrôle. Il s’ensuit que, dans l’hypothèse où un permis de construire n’est pas exécuté conformément à ce qui a été autorisé, il appartient à l’administration de relever, par le biais d’un procès-verbal de constat, tous les travaux devant donner lieu à régularisation ou bien, à défaut, d’agir lors du récolement des travaux, au stade de la déclaration d’achèvement faite par le pétitionnaire, par une mise en demeure de régulariser l’ensemble des travaux non conformes par le biais d’un permis modificatif.

L’arrêt réduit ainsi le champ d’application de la jurisprudence selon laquelle, « lorsqu’une construction a fait l’objet de transformation sans les autorisations d’urbanisme requises, il appartient au propriétaire qui envisage d’y faire de nouveaux travaux de déposer une déclaration ou de présenter une demande de permis portant sur l’ensemble des éléments de la construction qui ont eu ou auront pour effet de modifier le bâtiment tel qu’il avait été initialement approuvé » (CE, 13 décembre 2013, Mme Carn, req. n° 349081, mentionné aux Tables), en l’excluant pour le cas de travaux irréguliers entrepris sur le fondement d’une autorisation en cours de validité puisqu’en pareille hypothèse, ce n’est pas la construction existante qui est irrégulière mais l’exécution du permis de construire dont il est demandé la modification en cours de réalisation des travaux.

Conformément aux principes selon lesquels l’exécution du permis de construire est sans influence sur la légalité de l’autorisation délivrée (CE, 4 octobre 1974, Ministère de l’Equipement et du Logement, req. n° 86957) et le permis, même de régularisation, n’a d’autre objet que d’autoriser les travaux figurant dans la demande (CE, 18 mars 1983, Mme Siefert, req. n° 35255, publié au recueil Lebon), le maire ne saurait donc refuser un permis de construire modificatif au motif que des travaux irréguliers en cours ne seraient pas mentionnés dans la demande.

Ce faisant, le Conseil d’Etat réaffirme l’importance de la mise en œuvre des pouvoirs de visite et de contrôle pour faire cesser les illégalités en cours d’exécution d’un permis de construire d’une part, et donne également sa pleine portée au contrôle de l’administration de la conformité des travaux en application des articles L. 462-1 et L. 462-2 du code de l’urbanisme, d’autre part.

CE, 3 mai 2024, M. O., req. n° 472746, mentionné aux Tables.

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