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Irrecevabilité d’une requête dirigée contre une décision non encore intervenue

31 janvier 2024

Par une décision du 23 décembre 2023, le Conseil d’Etat a jugé qu’une requête dirigée à l’encontre d’une décision qui n’est pas encore née peut être rejetée par ordonnance comme étant manifestement irrecevable.

 

Par un courrier du 11 août 2021, reçu le 13 août suivant, un particulier et une association ont demandé au maire d’une commune d’abroger la décision de mettre en œuvre d’un logiciel, constitutif d’un traitement de données à caractère personnel, dans le cadre du déploiement d’un système de vidéosurveillance sur le territoire de la commune.

Sans attendre, dès le 3 septembre suivant, les demandeurs ont saisi le tribunal administratif de Grenoble d’une demande tendant à obtenir l’annulation du refus implicite du maire de faire droit à leur demande d’abrogation.

Par une ordonnance du 16 septembre 2021, confirmée par un arrêt du 7 avril 2022 de la cour administrative d’appel de Lyon, le président de la 5ème chambre du tribunal administratif de Grenoble a, sur le fondement des dispositions du 4° de l’article R. 222-1 du code de justice administrative, rejeté leur demande comme manifestement irrecevable au motif qu’il n’existait pas, à la date de son ordonnance, de décision administrative contestable.

Saisi du pourvoi en cassation, le Conseil d’Etat commence par rappeler les dispositions du 4° de l’article R. 222-1 et des articles R. 421-1 et R. 612-1 du code de justice administrative, pour en déduire que « (…) lorsqu’un requérant, après avoir présenté une demande à l’administration, saisit le juge administratif avant que celle-ci ne se soit prononcée sur cette demande, ses conclusions, dirigées contre une décision qui n’est pas encore née, sont irrecevables. Si cette irrecevabilité peut être couverte, en cours d’instance, par l’intervention d’une décision expresse ou implicite, il est loisible au juge, tant qu’aucune décision n’a été prise par l’administration, de rejeter pour ce motif les conclusions dont il est saisi. Une telle irrecevabilité étant manifeste et le juge ne pouvant inviter le requérant à la régulariser, puisqu’une telle régularisation ne peut résulter que de l’intervention ultérieure d’une décision expresse ou implicite, les conclusions qui en sont entachées peuvent être rejetées par ordonnance sur le fondement du 4° de l’article R. 222-1 du code de justice administrative ».

Ainsi, le Conseil d’Etat estime que le tribunal administratif de Grenoble, saisi d’une demande prématurée, n’était pas tenu d’attendre l’intervention d’une décision de la commune avant de statuer.

Le juge administratif a donc la faculté de rejeter par ordonnance, sur le fondement du 4° de l’article R. 222-1 du code de justice administrative, une requête dirigée contre une décision qui n’est pas encore née, sans attendre qu’elle naisse – ne laissant ainsi d’autre choix aux requérants que de former un nouveau recours une fois la décision, explicite ou implicite, intervenue.

 

CE 20 décembre 2023, M. B. et Association La Quadrature du Net, req. 463151, aux Tables

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