Dans une décision du 18 octobre 2024, le Conseil d’Etat confirme que les conclusions tendant à l’indemnisation du préjudice né d’une faute commise par l’État lors de la fixation, par arrêté, du montant des charges et des droits à compensation des compétences transférées sont irrecevables si cet arrêté est devenu définitif.
Après s’être désistée de son recours pour excès de pouvoir à l’encontre d’un arrêté fixant le montant des charges et le droit à compensation des compétences transférées, une collectivité a demandé la condamnation de l’Etat à lui verser une indemnité du fait de la sous-évaluation du montant de la dotation globale de compensation qui lui était due.
Saisi d’un pourvoi après que le tribunal administratif et la cour administrative d’appel ont rejeté la demande pour irrecevabilité, le Conseil d’État rappelle la jurisprudence Lafon (CE Sect., 2 mai 1959, n° 282), selon laquelle « dès lors qu’une décision ayant un objet exclusivement pécuniaire est devenue définitive avec toutes les conséquences pécuniaires qui en sont inséparables, toute demande ultérieure présentée devant la juridiction administrative qui, fondée sur la seule illégalité de cette décision, tend à l’octroi d’une indemnité correspondant aux montants non versés ou illégalement réclamés est irrecevable ».
Au cas présent, la demande indemnitaire était fondée sur le calcul des charges et, par conséquent, de la compensation des compétences transférées, tel que déterminé dans un arrêté initialement attaqué pour excès de pouvoir, avant désistement.
Le rapporteur public souligne que « réclamer une indemnisation pour une compensation minorée a exactement la même portée que demander l’annulation de l’arrêté qui a fixé le montant de la compensation, le mauvais calcul des charges étant la même cause ». La collectivité faisait pourtant valoir qu’elle n’avait été informée de l’insuffisante évaluation des dépenses qu’à compter de la communication du rapport d’observations de la chambre territoriale des comptes, six ans après l’entrée en vigueur de l’arrêté.
Néanmoins, le Conseil d’Etat conclut que, l’arrêté étant devenu définitif, les conclusions indemnitaires fondées sur une faute non indépendante de son illégalité ont valablement été rejetées pour tardiveté.
Cette jurisprudence reconnue comme « délibérément sévère » (conclusions L. Domingo sur l’arrêt commenté) a pu être récemment écartée dans une affaire où la faute invoquée avait été commise lors de l’établissement de la taxe, en amont de l’adoption de la décision de versement des sommes dues au titre des compensations. Dans ce cas, son caractère définitif ne faisait pas obstacle à la recevabilité de l’action indemnitaire (CE 1er juillet 2020, Communauté de communes de la région de Pouancé-Combrée, req. n° 419081).
CE 18 octobre 2024, Collectivité de Saint-Martin, req. n° 474903