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Inopposabilité de la prescription biennale aux paiements indus de rémunération des agents publics

03 avril 2017

La rémunération versée à un agent public sur le fondement d’un acte inexistant peut être répétée sans que celui-ci ne puisse se prévaloir du fait que son employeur aurait maintenu le versement pendant plus de deux ans. C’est ce qu’a affirmé expressément le Conseil d’État dans un arrêt du 3 mars dernier mentionné aux Tables du Recueil Lebon.

En l’espèce, une attachée territoriale exerçant les fonctions de secrétaire de mairie avait fabriqué un document qu’elle présentait comme un extrait d’une délibération autorisant la création d’un poste d’attaché principal ainsi qu’un arrêté la promouvant au grade d’attaché principal. Elle avait donc perçu une rémunération correspondant à son nouveau grade pendant plus de deux ans, jusqu’à son départ à la retraite le 1er mai 2012. Mais, à la suite d’un contrôle de la chambre régionale des comptes intervenu après son départ, le maire avait émis un titre exécutoire pour récupérer le trop versé le 26 octobre 2012.

Dans son pourvoi dirigé contre l’arrêt de la cour administrative d’appel de Nantes rejetant son appel contre le jugement du tribunal administratif, l’ancienne agent public se prévalait notamment de l’article 37-1 de la loi n°2000-321 du 12 avril 2000. Celui-ci dispose en effet que « les créances résultant de paiements indus effectués par les personnes publiques en matière de rémunération de leurs agents peuvent être répétées dans un délai de deux années à compter du premier jour du mois suivant celui de la date de mise en paiement du versement erroné, y compris lorsque ces créances ont pour origine une décision créatrice de droits irrégulière devenue définitive […] Les deux premiers alinéas ne s’appliquent pas aux paiements ayant pour fondement une décision créatrice de droits prise en application d’une disposition réglementaire ayant fait l’objet d’une annulation contentieuse ou une décision créatrice de droits irrégulière relative à une nomination dans un grade lorsque ces paiements font pour cette raison l’objet d’une procédure de recouvrement. ».

Mais, confirmant le raisonnement de la cour administrative d’appel, le Conseil d’État juge que le document présenté par la requérante comme l’extrait de la délibération créant le poste était un acte inexistant en l’absence de toute délibération prise en ce sens par le conseil municipal. Partant, il en déduit qu’il en va de même pour l’arrêté de promotion.

Ajoutant au surplus que l’arrêté de promotion inexistant avait été établi de manière frauduleuse et que la disposition précitée n’est applicable qu’aux décisions créatrices de droits, le Conseil d’État en déduit que la prescription biennale de l’article 37-1 de la loi du 12 avril 2000 est inopposable à la récupération du trop versé. Si elle est sévère, la solution ne surprend guère dès lors qu’il est de jurisprudence constante que les actes obtenus par fraude ne créent jamais de droit.

Après avoir estimé que l’absence de signature et de la mention des nom, prénom et qualité de son auteur sur le titre exécutoire n’entachait pas celui-ci d’illégalité dès lors que ces mentions figuraient sur la lettre d’accompagnent, le Conseil d’État conclut à l’absence d’erreur de droit et, par suite, à la légalité du titre exécutoire. Relaxée au plan pénal, la requérante devra tout de même rembourser la différence entre la rémunération perçue et la rémunération qu’elle aurait dû percevoir en application de son grade réel.

Références

CE 3 mars 2017, Mme G. c/ Commune de Montreuil-sur-Ille, req. n°398121, mentionné aux Tables

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