Un candidat indument évincé à une procédure de passation peut bénéficier de l’indemnisation de son manque à gagner et des frais engagés pour la présentation de l’offre si l’autorité concédante ne démontre pas que sa décision s’appuyait sur un motif d’intérêt général.
En l’espèce, le délégataire de l’exploitation d’une concession de plage ayant présenté une offre en vue d’en obtenir le renouvellement, a vu son offre rejetée par l’autorité délégante. Cette dernière a déclaré la procédure de passation sans suite, en invoquant les manquements contractuels commis par la société candidate et titulaire sortant. La société candidate sollicitait la condamnation de l’autorité délégante à l’indemnisation de son préjudice financier causé par le rejet de son offre, qu’elle estimait fautif.
Les juges rappellent tout d’abord, conformément à la jurisprudence du Conseil d’Etat (CE, 18 juin 2003, n° 249630), que lorsqu’un candidat à l’attribution d’un contrat public demande la réparation du préjudice né de son éviction irrégulière de la procédure d’attribution, il appartient au juge de vérifier d’abord si l’entreprise était ou non dépourvue de toute chance de remporter le contrat. Si l’entreprise avait des chances sérieuses d’emporter le contrat et si les juges constatent une irrégularité procédurale ayant conduit à son éviction, le candidat évincé peut être indemnisé de son préjudice direct et certain, en tenant compte de l’aléa qui affecte les résultats de cette exploitation et la durée de celle-ci. En revanche, le candidat ne peut prétendre à l’indemnisation de son manque à gagner si l’autorité délégante a renoncé à conclure le contrat pour un motif d’intérêt général.
En l’espèce, l’autorité concédante avait invoqué des manquements commis par l’attributaire sortant, dans le cadre de l’exécution de son contrat, notamment en ce qui concerne les règles d’urbanisme et les obligations contractuelles. Les juges ont estimé que les manquements reprochés ne justifiaient pas l’annulation de la procédure et un renoncement à conclure le contrat pour motif d’intérêt général.
Le Tribunal condamne donc l’autorité concédante à verser au titulaire sortant, candidat indûment évincé, la somme de 55 000 euros correspondant à son manque à gagner (incluant les frais de présentation de l’offre), estimé sur la base du compte de résultat prévisionnel et prenant en compte l’aléa affectant les résultats de ce type d’exploitation et la durée du sous-traité de concession, ainsi que la période d’état d’urgence sanitaire ayant impacté les résultats.
TA Nice, 8 août 2024, SARL Le Klubbing, n° 2104250