L’article 90 de l’ordonnance n° 2015-899 du 23 juillet 2015 prévoit, en ce qui concerne les marchés de partenariat, que « les acheteurs peuvent recourir à l’arbitrage tel qu’il est réglé par le livre IV du code de procédure civile pour le règlement des litiges relatifs à l’exécution des marchés de partenariat, avec application de la loi française ». Dans un arrêt d’assemblée du 9 novembre 2016, éclairé par son analyse au Recueil Lebon, le Conseil d’État a précisé les conditions de mise en œuvre de cette disposition.
D’abord, il affirme que le renvoi au livre IV du code de procédure civile n’avait pas d’incidence sur les règles de compétence précédemment dégagées par le Tribunal des conflits (v. notamment TC 17 mai 2010 INSERM, n° C3754 : publié au recueil Lebon). Par suite, si le marché de partenariat ne met pas en jeu les intérêts du commerce international, le recours dirigé contre la sentence arbitrale qui se rapporte à son exécution relèvera systématiquement de la compétence du juge administratif. En revanche, si ce contrat met en jeu les intérêts du commerce international, un tel recours ne relèvera de la compétence du juge administratif que si le contrat relève d’un régime administratif d’ordre public, impliquant le contrôle de la conformité de la sentence aux règles impératives du droit public français relatives à l’occupation du domaine public ou à celles qui régissent la commande publique. Lorsque le juge administratif est compétent, c’est au Conseil d’État qu’il revient de se prononcer sur un tel recours, en application de l’article L.321-2 du code de justice administrative.
Ensuite, le Conseil d’État expose que lorsqu’il est amené à se prononcer sur un tel recours, il lui appartient de s’assurer, le cas échéant d’office, que la convention d’arbitrage est régulière. Si tel est bien le cas, seules deux catégories de moyens ont un caractère opérant. D’une part, les moyens tirés de ce que la sentence a été rendue dans des conditions irrégulières, c’est-à-dire si le tribunal arbitral s’est déclaré à tort compétent ou incompétent, s’il a été irrégulièrement composé, s’il n’a pas statué conformément à la mission qui lui avait été confiée, s’il a méconnu le principe du contradictoire ou s’il n’a pas motivé sa sentence. D’autre part, les moyens tirés de ce que la sentence est contraire à une règle d’ordre public, c’est-à-dire lorsqu’elle fait application d’un contrat dont l’objet est illicite ou entaché d’un vice d’une particulière gravité relatif notamment aux conditions dans lesquelles les parties ont donné leur consentement, lorsqu’elle méconnaît des règles auxquelles les personnes publiques ne peuvent déroger, telles que notamment l’interdiction de consentir des libéralités, d’aliéner le domaine public ou de renoncer aux prérogatives dont ces personnes disposent dans l’intérêt général au cours de l’exécution du contrat, ou lorsqu’elle méconnaît les règles d’ordre public du droit de l’Union européenne. Tel est le cas par exemple de la règle selon laquelle, même dans le silence du contrat, le maître d’ouvrage peut toujours faire procéder aux travaux publics objet du contrat aux frais et risques de son cocontractant ; en revanche tel n’est pas le cas des modalités d’indemnisation du cocontractant d’un contrat de la commande publique conclu à prix forfaitaire en cas de survenance de difficultés d’exécution.
Enfin, le Conseil d’État précise qu’un contrôle analogue doit être exercé par le juge administratif lorsqu’il est saisi d’une demande tendant à l’exequatur d’une sentence arbitrale.
Références
CE, Ass. 9 novembre 2016, Société Fosmax A., req n° 388806, Publié au Recueil