En cette fin d’année 2024, le Conseil d’Etat est venu préciser les conditions de l’action en responsabilité quasi-délictuelle du maître d’ouvrage à l’encontre d’un participant à une opération de construction, qui ne peut être mise en œuvre si le maître d’ouvrage a laissé prescrire l’action en responsabilité contractuelle dirigée contre son cocontractant.
Les faits du litige concernent l’exécution d’un marché public de travaux portant sur le remplacement de fenêtres d’un immeuble de bureaux. Le titulaire du marché a passé commande des fenêtres auprès d’une entreprise tierce au marché qui n’était donc liée par aucun contrat avec le maître d’ouvrage. À la suite de nuisances sonores liées au vent et imputées par les occupants des locaux aux fenêtres nouvellement posées, le maître d’ouvrage a saisi le Tribunal administratif d’une action indemnitaire dirigée à l’encontre du titulaire du marché, sur le fondement de sa responsabilité contractuelle, ainsi qu’à l’encontre de la société tierce sur le fondement quasi-délictuel. Débouté en première instance puis en appel, au motif que son action en responsabilité contractuelle était prescrite, le maître d’ouvrage s’est pourvu en cassation.
Dans sa décision du 30 décembre 2024, qui sera mentionnée aux tables du recueil Lebon, le Conseil d’Etat a validé la position des juges du fond et rejeté le pourvoi, constatant, d’une part, que l’action en responsabilité contractuelle du maître d’ouvrage était bien prescrite sur le fondement de l’article 2224 du code civil et, d’autre part, que le maître d’ouvrage ne pouvait, dans ces circonstances, rechercher la responsabilité quasi-délictuelle de l’entreprise tierce.
Le Conseil d’Etat a ainsi rappelé que le maître d’ouvrage pouvait, dans le cas où la responsabilité du ou de ses cocontractants ne pourrait pas être utilement recherchée, mettre en cause, sur le terrain quasi-délictuel, la responsabilité des participants à une opération de construction avec lesquels il n’a pas conclu de contrat de louage d’ouvrage, mais qui sont intervenus sur le fondement d’un contrat conclu avec l’un des constructeurs (v. CE 7 décembre 2015, Commune de Bihorel, req. n°380419, publié au Rec. ; v. également par ex. CE 27 janvier 2017, Société Baudin Châteauneuf Derveaux, req. n° 397311, mentionné aux Tables ; CAA Lyon 20 juin 2024, OPH de l’Ain Dynacité, req. n°23LY00149). Le Conseil d’Etat a ensuite précisé que « le maître d’ouvrage ne saurait cependant rechercher cette dernière responsabilité lorsqu’il a laissé prescrire l’action en responsabilité contractuelle qu’il pouvait exercer contre son ou ses cocontractants. ».
Les juges du fond n’ayant donc pas commis d’erreur de droit, le pourvoi a été rejeté.