Rechercher
Fermer ce champ de recherche.

Intérêt d’une collectivité territoriale à intervenir au soutien d’un pourvoi en cassation

28 octobre 2024

Par un arrêt du 12 juillet 2024, le Conseil d’État précise que l’intervention en cassation d’une personne morale de droit public doit – pour être recevable – se rattacher à ses compétences législatives, qui sont toutefois appréciées souplement.

Une société a – dans le cadre de la construction d’un parc éolien sur le territoire d’une commune – présenté une demande d’autorisation environnementale, qui a été rejetée par un arrêté du préfet de la Haute-Loire. Conformément à l’article R. 311-5 du Code de justice administrative qui prévoit la compétence en premier et dernier ressort des Cours administratives d’appel en matière de décisions relatives aux installations de production d’électricité utilisant l’énergie mécanique du vent, la société a saisi la cour administrative d’appel de Lyon pour contester la légalité de cette décision préfectorale. Le 14 avril 2022, la juridiction a annulé l’arrêté du préfet et délivré l’autorisation demandée en renvoyant la société devant le préfet pour la détermination des mesures à prendre pour protéger les intérêts énumérés à l’article L. 511-1 du Code de l’environnement. Une association s’est pourvue en cassation contre cet arrêt et la région Auvergne Rhône-Alpes est intervenue au soutien du pourvoi.

Dans cette affaire, le Conseil d’État précise donc les conditions de la recevabilité de l’intervention volontaire d’une collectivité territoriale. Il applique le critère de « l’intérêt suffisant eu égard à la nature et à l’objet du litige » (CE, Sect., 25 juillet 2013, OFPRA, req. n°350661). S’il est ainsi constant que la suffisance de cet intérêt s’apprécie par rapport à l’objet statutaire et aux actions des personnes morales de droit privé, le Conseil d’Etat précise ici pour la première fois que la suffisance de l’intérêt des personnes morales de droit public s’apprécie par rapport à leurs compétences législatives.

En l’espèce, le Conseil d’Etat a retenu que la « région Auvergne-Rhône-Alpes justifie, compte tenu notamment de ses compétences en matière de développement touristique régional et eu égard à la nature et à l’objet du présent litige qui concerne des sites et monuments d’intérêt majeur au plan régional tels que la cathédrale du Puy-en-Velay, inscrite au patrimoine mondial de l’UNESCO, d’un intérêt suffisant à intervenir au soutien du pourvoi de l’association ».

Le Conseil d’État ne s’est fondé sur aucun texte précis pour admettre la compétence touristique de la région, alors même que le rapporteur public, M. Fréderic Puigserver, mentionnait les articles L. 111-1 et L. 111-2 du Code du tourisme, aux termes desquels « l’État, les régions, les départements et les communes sont compétents dans le domaine du tourisme et exercent ces compétences en coopération et de façon coordonnée ».

Dès lors, le critère de l’intérêt à intervenir d’une personne morale de droit public est apprécié de manière assez souple par le juge administratif. Cette approche est à mettre en perspective avec la portée de l’intervention, qui ne permet pas à l’intervenant de présenter des conclusions propres mais simplement de soulever tout moyen dès lors qu’il ne se rattache pas à une cause juridique nouvelle.

L’admission de l’intérêt à intervenir reste toutefois hautement casuistique. Le rapporteur public soulignait ainsi que l’intérêt à intervenir doit être reconnu « au cas par cas, compte tenu des caractéristiques du projet et de sa proximité avec des lieux remarquables de la région, constituant un élément important de son patrimoine touristique et culturel ».

Sur le fond, le Conseil d’Etat n’a pas cassé l’arrêt de la cour administrative d’appel de Lyon et n’a donc pas remis en cause l’autorisation environnementale délivrée à la société.

CE, 12 juillet 2024, Association Regards de la Durande et autres, req. n°464958

Newsletter