Par un arrêt du 13 décembre 2023, la chambre commerciale de la Cour de cassation est venue préciser, de manière inédite, que la saisie par le créancier de la résidence principale du débiteur demeure possible après la clôture de la liquidation judiciaire pour insuffisance d’actif.
L’article L. 526-1 du code de commerce consacre une insaisissabilité de principe de la résidence principale de l’entrepreneur individuel en procédure collective. Néanmoins, cette règle connait des tempéraments puisqu’elle est inopposable aux créanciers dont la créance est antérieure à l’entrée en vigueur de ce texte (loi n° 2015-990 du 6 août 2015) et aux créanciers dont la créance n’est pas née de l’activité professionnelle du débiteur, lesquels peuvent poursuivre la procédure de saisie pendant la liquidation judiciaire (Com. 5 avr. 2016, n°14-24.640).
Néanmoins, sauf exceptions limitativement énumérées à l’article L. 643-11 du code de commerce, le jugement de clôture de liquidation judiciaire pour insuffisance d’actif fait obstacle à l’exercice de nouvelles poursuites contre le débiteur.
Dans l’arrêt commenté, une banque avait accordé un prêt immobilier à un couple d’entrepreneurs individuels et fait délivrer, après la clôture de la liquidation judiciaire pour insuffisance d’actif, un commandement de payer valant saisie-vente de l’immeuble constituant leur résidence principale puis une assignation devant le juge de l’exécution.
La cour d’appel déclare irrecevable l’action de la banque tendant à saisir l’immeuble des époux au motif que cette action n’entre dans aucune des exceptions prévues à l’article L. 643-11 du code de commerce permettant la reprise des poursuites après la clôture pour insuffisance d’actif de la liquidation judiciaire.
La Cour de cassation casse l’arrêt au visa des articles L. 526-1 et L. 643-11 du code de commerce en soulignant qu’« il résulte du premier de ces textes que le créancier auquel l’insaisissabilité de plein droit de la résidence principale est inopposable peut, même après clôture de la liquidation judiciaire pour insuffisance d’actif, et sans que le second texte y fasse obstacle, exercer son droit de poursuite sur l’immeuble, qui n’était pas entré dans le gage commun des créanciers de la liquidation judiciaire ».
Cette décision est salutaire puisqu’elle préserve les droits du créancier au-delà de la clôture de la liquidation judiciaire pour insuffisance d’actif, sous réserve, bien entendu, que le bien demeure saisissable.
Cass. com., 13 décembre 2023, n°22-19.749, Publié au bulletin