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Les effets de la majoration illégale du délai d’instruction sur la naissance d’une autorisation d’urbanisme tacite

03 novembre 2023

Par un arrêt du 24 octobre 2023, publié au Recueil, le Conseil d’Etat est venu préciser les conséquences d’une majoration illégale du délai d’instruction sur la naissance d’un permis de construire tacite.

Tout d’abord, s’alignant sur sa récente décision Commune de Saint-Herblain (CE Section, 9 décembre 2022, req. n° 454521, publié au Recueil), le Conseil d’Etat juge qu’à l’expiration du délai d’instruction tel qu’il résulte de l’application des dispositions du chapitre III du titre II du livre IV du code de l’urbanisme relatives à l’instruction des déclarations préalables, des demandes de permis de construire, d’aménager ou de démolir, naît une décision de non-opposition à déclaration préalable ou un permis tacite. De sorte qu’une modification du délai d’instruction notifiée après l’expiration du délai d’un mois prévu à l’article R. 423-18 de ce code de l’urbanisme ou qui, bien que notifiée dans ce délai, ne serait pas motivée par l’une des hypothèses de majoration prévues aux articles R. 423-24 à R.423-33 du même code, n’a pas pour effet de modifier le délai d’instruction de droit commun à l’issue duquel naît un permis tacite ou une décision de non-opposition à déclaration préalable.

La majoration illégale du délai d’instruction d’un permis de construire ou d’une déclaration préalable ne fait donc pas obstacle à la naissance d’une autorisation tacite une fois les délais légaux prévus par le code de l’urbanisme expirés. 

Cela étant, dans la lignée de la jurisprudence Saint-Herblain, le Conseil d’Etat refuse ensuite de contrôler le bien-fondé de la prolongation du délai d’instruction eu égard au projet en cause, dès lors qu’elle est in fine sans incidence sur la légalité de la décision attaquée. Par suite, quand bien même elle serait en réalité mal fondée, la prolongation du délai d’instruction d’une demande d’autorisation d’urbanisme qui est motivée par l’une des hypothèses de majoration du délai d’instruction prévu par le code de l’urbanisme et qui n’est pas tardive, ne saurait avoir pour effet de rendre le pétitionnaire titulaire d’une décision de permis de construire tacite à l’issue du délai légalement applicable. C’est précisément ce qui avait été jugé en appel par la Cour administrative d’appel de Marseille. Pour éviter toute stratégie manifestement dilatoire, la Haute juridiction exige néanmoins que l’autorité instructrice puisse établir, en cas de majoration du délai d’instruction, qu’elle a bien procédé à la consultation ou mis en œuvre la procédure ayant motivé cette majoration.

Enfin, abandonnant une jurisprudence ancienne (CE, 22 octobre 1982, Société Sobeprim, req. n° 12522, publié au Recueil), le Conseil d’Etat juge que la lettre adressée par le service instructeur au pétitionnaire, majorant le délai d’instruction au-delà des possibilités légales, n’est pas une décision faisant grief, susceptible de faire l’objet d’un recours pour excès de pouvoir ; et que son illégalité ne peut pas être utilement soulevée par voie d’exception, à l’occasion du recours dirigé contre la décision de refus de permis de construire, qui ne trouve pas sa base légale dans cette lettre et n’est pas prise pour son application.

CE, 24 octobre 2023, Commune d’Aix-en-Provence, req. n° 462511, publié au Recueil.

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